DESIGN POUR RÉFUGIÉS

Ils ont tout ou presque tout perdu. Ils ont laissé derrière eux leurs maisons, leurs affaires, leurs souvenirs, souvent leurs familles et leurs amis. Ils s’embarquent au péril de leur vie dans un petit canoë précaire et échouent – s’ils ne se sont pas noyés en route – sur des plages en Grèce pour continuer de là leur éprouvant périple vers une vie plus paisible. Sur la plage restent les vestiges de leur passage: des zodiac abimés et des gilets de sauvetage dessinant une bande orangée…

Ce qui s’est souvent perdu lors du voyage ou ne tient plus, c’est les bagages, les sacs, valises et autres baluchons contenant le peu que l’on a pu emporter.

Deux initiatives prennent les choses en main. Des bénévoles hollandais, touchés par ce qu’ils ont vu à Lesbos et ailleurs, ont organisé des ateliers pour apprendre aux réfugiés comment fabriquer des sacs simples, solides et imperméables à partir de sangles des gilets et des coques en plastique des bateaux. Trois outils est tout dont on a besoin: des ciseaux, une poinçonneuse et une riveteuse!

Un autre projet dans le même esprit et en utilisant les mêmes matières premières est en train de se monter à l’aide d’un financement participatif sur Indigogo: NoBorders Backpack. Le collectif « Embassy for the Displaced », dont l’objectif est de développer des solutions pour les migrants, et qui est basé entre Londres, Athènes et Lesbos – où en hiver arrive un millier de personnes par jour (et encore bien plus en été) – souhaite établir une petite production de sacs à dos dans le camp de réfugiés autogéré à Mytilène. Les sommes récoltées serviront à acheter trois machines à coudre, du fil et des cordes élastiques, de verser un petit salaire aux locaux qui travaillent dans cette structure et aussi de développer d’autres produits pour les réfugiés.

Face au désespoir mais aussi au courage des gens qui sont forcés à quitter tout et se trouvent confrontés à l’hostilité de certaines franges de la population européenne tout comme à l’incapacité des gouvernements et institutions de gérer correctement et avec empathie cette crise il est à la société civile de se mobiliser – et heureusement elle le fait comme le prouvent des projets et initiatives un peu partout!

TRASH + CROCHET = TROCHET

Quand on parle de l’Arabie Saoudite on pense à pétrodollars, femmes sans visages enveloppées dans du noir, pèlerins à la Mecque, chaleur suffocante…

Certes ceci existe tout comme un blogeur menacé de torture, des femmes en prison pour vouloir conduire et d’autres côtés sombres et peu engageantes de ce pays. Mais il y a aussi – il n’y a jamais que du noir – un vivier de jeunes gens créatifs et plein d’humour. Je me souviens par exemple de vidéos vues à la Biennales de Venise, des courts métrages désopilants (amusez vous en regardant Hishaam Fagheeh & Friends dans « No woman no drive »)

Bref, Jeddah est une ville vivante et innovatrice (un peu à l’opposé de Riyad) et c’est là où je vous amène aujourd’hui. C’est ici où une conférence sur l’impact catastrophique du plastic sur l’environnement a alerté, une jeune femme, Diana Rayyan. Tout d’abord elle a milité en divulguant tout ce qu’elle avait appris sur ce fléau avant de décider de prendre les devants et lancer un projet plus ambitieux. Son idée était d’apprendre à des femmes défavorisées la technique du crochet et de fabriquer ensuite des objets avec des fils obtenus en recyclant les sacs en plastic qui pullulent partout.

Même si au début la plupart de gens étaient sceptiques voire hostiles à l’utilisation de ce « trash », Diana ne s’est pas laissée détourner de son projet. Elle a trouvé son alter ego, son « creative guru« , en Ishrat Khawje, jeune designer qui a un blog autour du crochet mais aussi de recettes et d’autres travaux manuels sympathiques: http://fruitfulfusion.blogspot.fr/

Un crowdfunding sur une plateforme de financement participatif a ensuite permis de réunir les 5.000 $ nécessaires pour louer une petite usine où former les femmes et stocker les sacs.

50 femmes crochètent « hip, trendy, must-have products for the globally oriented and environmentally aware city dweller« : sacs pour la plage, tapis de yoga, boules contre les stress, « beanbag chairs » (notre fatboy)…

Les deux initiatrices espèrent développer leur production et pouvoir embaucher encore plus de femmes tout comme débarrasser les paysages et villes de leur pays de ces sacs plastics envahissants.

THESE BOOTS ARE MADE FOR WALKIN’

Depuis 1970 se déroule chaque année dans la charmante petite ville de Glastonbury dans le Somerset un des plus grands festivals de musique et d’art de spectacle dans le monde, le « Glastonbury Festival of Contemporray Performing Arts« . Même si la musique est un pilier central – avec des célébrités comme par exemple Beyoncé, Paul Simon, Kool and the Gang, Pharrell Williams ou encore Patti Smith – mais on y assiste aussi à des spectacles de danse, de cirque, de cabaret, de théâtre…

Ce festival qui attire des milliers de spectateurs à chaque édition s’engage depuis 25 ans également pour des bonnes causes. Des logos d’Oxfam, Greenpeace ou WaterAid sur les tickets en sont la preuve.

Cette année les responsables ont collectionné les bottes en caoutchouc trouvées abandonnées sur le terrain du festival, ont méticuleusement repéré les pointures, vérifié l’état et formé des paires. 500 paires ont donc pu trouver une nouvelle vie et ont été envoyées à Calais pour en équiper les migrants.

Émue et choquée par ce qu’elle a vu des conditions de vie dans la fameuse « jungle », Liz Clegg, représentante du Festival, s’est rendue compte que le « waste management » et le recyclage sont un important challenge. Calais Migrant Solidarity, un groupe Facebook, envoie désormais des équipes à Calais pour soutenir les réfugiés dans ce domaine et mettre sur pied un système pour gérer leurs déchets. Le  festival soutient cette action en mettant à disposition des sacs poubelle.

http://www.glastonburyfestivals.co.uk/

https://www.facebook.com/groups/calaismigrantssolidarity/?fref=ts

(Le titre de ce post est inspiré par la célèbre chanson éponyme de Nancy Sinatra)